Ethique, justice et libéralisme

Le libre-échange, selon la « Théorie des avantages comparatifs » (Adam Smith), est censé provoquer des gains pour le consommateur final du fait de la diminution du coût des importations. Dans la réalité, il en va bien différemment : la concurrence internationale a toujours fait pression à la baisse. Mais sur les salaires uniquement. Jusqu’à une éventuelle délocalisation de l’activité. La redistribution des richesses induite par l’ouverture d’un pays (mesurée par le ratio commerce extérieur sur produit intérieur brut) est toujours au désavantage des salariés. Même pour un pays aussi puissant commercialement que les Etats-Unis.

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M. Gloupier a encore frappé, une fois !

 Dans un monde moderne peuplé de requins (les multinationales) et de diafoirus internationaux (les experts du F.M.I, dont l’acronyme signifie Faim Misère & Ignorance, la seule croissance économique possible est une croissance autocentrée, c’est-à-dire financée par la puissance publique et protégée par des barrières douanières. L’Inde, la Chine, la Corée du Sud en sont l’exemple. Et tous les pays africains, le contre-exemple.

Le libéralisme est avant tout une doctrine qui justifie le pillage des ressources du Sud par le Nord. Une idéologie servant à maintenir un néo-colonialisme économique. C’est toujours la loi du plus fort. Exemple : les Etats-Unis copient la molécule du Cipro, médoc anti-anthrax breveté par Bayer (firme allemande) lorsque le pays est menacé. Seul argument opposé à Bayer : votre produit est trop cher. Les Allemands ont plié, car ils sont « clients » aux Etats-Unis pour leur défense nationale. Mais simultanément les Etats-Unis refusent (malgré un début d’accord obtenu à l’arraché à Doha mais sur lequel ils sont revenus) la production hors copyright de certains génériques par des pays pauvres. Notamment, mais pas seulement, les médocs entrant dans les tri-thérapies.

Il n’y a aucune éthique dans tout ceci. Le capitalisme se fout de l’éthique, il ne pense qu’à sa propre accumulation. Un petit actionnaire ne se préoccupe pas de l’honnêteté de l’entreprise dans laquelle il a investi. Ou seulement quand l’action chute parce que le scandale (une dissimulation de pertes, par exemple) est soudain trop flagrant. Ca, c’est de l’éthique boursière. Et lorsque le marketing nous sert des fonds éthiques, c’est juste que quelqu’un a été contrôler que l’entreprise dans laquelle le fonds va investir, n’assassine pas, ne trafique pas d’esclaves, n’emploie pas d’enfants de moins de sept ans, etc. Max Havelaar : c’est super ce que vous faites. Elf, Total : la Birmanie, beuurk.

Selon John Rawls, philosophe américain chantre du libéralisme, entre une société qui donne 10 au plus pauvre et 100 au plus riche et une autre société qui donne 20 au plus pauvre et 1000 au plus riche, le plus pauvre comme le plus riche préfèreront chacun la deuxième société. Ce qui revient à dire : « Soyez heureux car vous pourriez être encore plus pauvre que vous ne l’êtes déjà ». Mais qu’est-ce qu’une justice inégalitaire ? De la couille en boîte !

Je préfère la société qui, si elle détient 1000 plus 20, soit 1020, en donne 510 à l’un et 510 à l’autre. Mais ce n’est pas le cas aux Etats-Unis où en 1979, les 5% les plus riches gagnaient 9 fois plus que les 5% les plus pauvres; tandis qu’aujourd’hui c’est quinze fois plus. Elle est pas belle, la vie de riche ?

Le libéralisme voudrait nous faire croire qu’il est le meilleur système d’enrichissement mutuel, mais c’est faux; qu’il est éthique, mais c’est encore faux; qu’il est équitable, à la manière de John Rawls, mais c’est toujours faux, archi-faux. Voila pourquoi M. Bill Gates a bien mérité sa tarte à la crême dans la gueule.