Le capitalisme moderne repose sur quelques grands principes, au premier rang desquels celui-ci : pour survivre, il doit privatiser les bénéfices et collectiviser les pertes.
Les scandales financiers aux Etats-Unis (Enron, Worldcom, etc) et ailleurs dans le monde, notamment en France, sont là pour nous le rappeler. Flash-back sur une catastrophe historique.
Enron en l’an 2000 fait 100 milliards de dollars de chiffre d’affaires dans le courtage de l’énergie, notamment de l’énergie électrique. En même temps qu’elle dissimule pour 20 milliards de pertes par création de filiales bidons dans différents paradis fiscaux. Kenneth Lay et Jeff Skillings, les patrons ripoux, vendent pour 10 millions de dollars d’actions, peu avant le scandale, tout en incitant leurs salariés à acheter de l’Enron. Kenneth Lay touche 123 millions de stock-options avant sa mise à la porte. Détail qui n’en est pas tout à fait un : cinq membres du gouvernement américain (dont Dick Cheney, Condolezza Rice, etc) ont ou ont eu des intérêts directs dans Enron. La campagne de Doubia a été financée par Enron à hauteur de 300 000 dollars. L’Etat américain, filiale d’Enron…
Wordlcom, en 2001, fait pour 1,4 milliards de dollars de bénéfices. En apparence seulement, car elle dissimule pour 4 milliards de pertes. Lorsque le pot aux roses est découvert, elle licencie 17 000 personnes, soit un cinquième de ses effectifs. Mais trouve encore assez de liquidités pour payer à Bernie Ebbers (encore un ripou !) 366 millions de dollars (mais oui ! et en cash, encore !). La société est endettée de 30 milliards de dollars suite au rachat, au cours des 17 dernières années, de 75 compagnies locales de téléphone.
Après Enron et Worldcom, aux Etats-Unis, ce fut au tour de Tyco (industrie), Global Crossing (Communications) Dynegy (Energie) Q-West (Communications) Imclone (Biotech) MobilCom (Communications) Xerox Disney (Culture – sic) d’annoncer des pertes plus ou moins louches. Vivendi-Universal (Communications) et Orange-France Télécoms (Communications) en France. Mais Orange, qui s’enlise en s’associant à Deutsche Telekom, c’est du pipi de chat, à côté de Worldcom…
Alors comment le capitalisme collectivise-t-il les pertes? C’est simple : aux Etats-Unis les employés qui travaillent dans ces grosses sociétés sont fortement incités à acheter des actions de « leur » société. Faire différemment est très mal vu. Donc l’épargne des salariés de Worldcom ou Enron a fumé instantanément. Autres perdants, les fonds de pension qui avaient investi dans des entreprises dont les cours se sont cassés la gueule en quelques heures. Et donc les épargnants, qui cotisent à ces fonds pour leurs retraites et qui font confiance à des requins.
En France, lorsqu’un scandale similaire, celui du Crédit Lyonnais, avait éclaté, suite à des engagements aventureux derrière quelques margoulins tels Bernard Tapie rachetant Adidas, le gouvernement Bérégovoy avait mis en place la structure de liquidation des actifs indispensable à arrêter l’incendie. Plantu dans le Monde avait sorti le dessin d’un contribuable qui disait : « C’est la première fois que je paye des agios dans une banque où je n’ai pas de compte ». C’était particulièrement bien vu ! Et en dix ans, l’Etat a fini par éponger les pertes.
Dans le cas des Etats-Unis, il semble que la seule sortie de crise désormais envisagée soit dans une « bonne » guerre. Pour détourner l’attention des petits épargnants et leur faire oublier qu’ils ont été salement cocufiés par leurs patrons et leurs politiciens, d’abord. Pour relancer les affaires du complexe militaro-industriel, qui est le véritable coeur de l’économie américaine, surtout.