Les sujets d’examen du Ministère de l’Education Nationale donnent parfois une certaine idée de l’histoire du moment, histoire officielle. A l’examen de français du B.E.P (Brevet d’Etudes Professionnelles) de juin 2015 , les élèves de l’enseignement professionnel ont dû s’infuser un extrait du “Rapport et projet de décret relatifs à l’organisation générale de l’instruction publique ” 1782 – Condorcet.
Si le gros marquis (c’est ainsi que le nomme le grand historien de la Révolution française Albert Mathiez p. 184, Histoire de la Révolution française, Bartillat édit.) défend dans ce “Rapport”, l’idée d’une instruction “universelle” étendue à tous les citoyens, il écrivait cependant, en 1780 ,dans une “dissertation philosophique” en réponse à la question d’un concours lancé par l’Académie de Frédéric II : “Peut-il être utile de tromper le peuple ?” :
“En parlant raison au peuple, en ne lui apprenant que des choses vraies, dans le petit nombre d’instant qu’il peut donner à la culture de son esprit, on pourrait l’instruire du peu qu’il lui est nécessaire de savoir .” (SIC!) (cité par Jean Varloot dans “Histoire littéraire de la France” T.II Editions Sociale)
Dans son Histoire de la Révolution Française, Albert Mathiez écrit que le “ci-devant marquis de Condorcet, gros personnage académique, était comme Brissot, un caractère ondoyant et divers”. Outre qu’il s’était montré hostile à la Déclaration des Droits de l’Homme, il avait protesté contre la suppression des titres de noblesse, contre la confiscation des biens du clergé, contre les assignats. C’est après Varennes qu’il adhère “bruyamment” (selon Mathiez) à la République.
Il sera condamné à mort par contumace le 2 octobre 1793. Malgré son “incognito”, il est arrêté comme suspect et meurt d’épuisement en prison le 30 mars 1794.
L’idéal des Lumières que défendait le marquis de Condorcet, encyclopédiste, était emprunt d’une culture aristocratique européenne, certainement davantage européenne que républicaine (ses hésitations à livrer la République au duc de Brunswick l’attestent).
On peut se demander si l’histoire du moment, histoire officielle dont les nouvelles orientations vendent le Collège et le lycée aux marchands, qui permettent l’accroissement des “boîtes à bac” que seules les familles aisées peuvent payer à leurs enfants, qui autorisent le fait que des femmes musulmanes voilées puissent accompagner des sorties scolaires à l’école primaire, on peut se demander si notre histoire est encore l’histoire de la République ?