COVID ou pas COVID, en 2021, le système scolaire est resté tel que Pierre Bourdieu l’avait décrit en 1970, c’est à dire un système de reproduction des élites, et ce malgré tous les beaux discours politiques moralisateurs actuels.
Système scolaire rigide, sans aucune dimension artistique, sans aucune fantaisie.
En outre, dans sa dimension actuelle, plus que jamais, un système qui abandonne chaque élève à ses propres croyances, à sa communauté, un système qui a complètement renoncé à éduquer à l’esprit critique, à développer la liberté d’expression dans le respect de celle de l’autre (voir l’assassinat de Samuel Paty).
C’est pourquoi, il est inutile de parler d’Education Nationale mais plus juste de dire Garderie Nationale. D’ailleurs, on voit bien que ce qui préoccupe les politiques actuels ce n’est pas que les enfants soient éduqués ensemble, instruits, mais gardés.
Pour mettre un peu de fantaisie là-dedans, il faudrait un nouveau courant émancipateur, tel celui de l’anti-psychiatrie, pour donner de la liberté, de la respiration, de la considération pour les différentes paroles, même celles qui semblent les plus folles.Commencer par considérer les enfants, les jeunes non pas comme des « gamins », comme des débiles, mais comme des individus pensant.
Ces courants émancipateurs diffusés dans les années 1970 ont inspiré de nombreux enseignants Mais leurs applications concrètes dans les établissements scolaires se sont toujours heurtées à la norme du système institutionnel, aux contraintes administratives ainsi qu’à l’opposition d’autres enseignant plus soucieux de faire carrière que de rendre libres les élèves.
Ainsi, la circulation à l’intérieur des murs est devenu quasi impossible comme dans l’asile psychiatrique décrit par Michel Foucault dans Surveiller et Punir .
Chaque enseignant est cloisonné dans sa salle de cours et peu à peu , comme dans l’asile où « l’aliénation du malade est redoublée par les effets de l’institutionnalisation de la maladie »(Maud Mannoni), il s’efforce de le demeurer, surtout quand il s’est battu pour obtenir ce petit confort au bout de dix années passées dans le même établissement scolaire. Surtout, ne pas bouger. Quant aux autres, les nouveaux, qu’ils se débrouillent !
Sortir des murs avec les élèves se fait, parfois, mais le plus souvent, chacun avec sa classe. Chacun avec son projet personnel concocté pour être reconnu et récompensé par les Inspecteurs. Gagner ainsi un échelon, sans garantie cependant.
Ceux parmi les profs qui considèrent les élèves comme des êtres doués de la même intelligence, les « maîtres ignorants » ( voir Le maître ignorant de Jacques Rancière), perdent leur temps, se fatiguent inutilement. Bons pour l’épuisement.
Le plus inquiétant dans tout ça, c’est qu’on entend, depuis la crise COVID-19, que l’Ecole doit servir non seulement à garder les élèves mais encore à les soigner psychiquement parce que, nous disent les Politiques et les Médias, les élèves, les étudiants dépriment à la maison.
On attend donc des profs qu’ils deviennent psychiatres !????
Quelle folie docteur, non ?
Professeur Mottro, 5 février 2021.