Il y a encore trois ans, Marine Le Pen avait inclus dans son programme de gouvernement, un référendum portant sur la sortie de l’euro et la dénonciation par la France des traités fondant l’Union européenne.
Plus rien de tel aujourd’hui. Il n’est plus question de Frexit nulle part. Il y a bien ici et là, dans les discours, de virulentes critiques de l’euro, accusé de tous les maux en matière de perte de pouvoir d’achat des Français. Et on pourrait croire qu’il s’agit d’un coup de grisou de plus de quelques vieux caciques.
Et pourtant non : la connerie pourrit l’adn de l’extrême droite depuis très longtemps…
Historiquement, j’analyse la construction européenne comme un des grands chantiers intergénérationnels dans lequel les puissances coloniales européennes, défaites dans les années 50-60, se sont lancées. En lieu et place de l’expansion et des guerres de domination menées à l’encontre des peuples du Sud. Un moyen d’occuper leurs forces vives (et leurs jeunes générations de baby-boomers) a autre chose qu’à préparer la prochaine guerre.
Si l’on poursuit le trait, comment une droite qui pense encore que l’Occident chrétien a une mission civilisatrice et que la colonisation a produit des effets positifs pour les populations autochtones, peut elle vouloir construire une entente européenne (et au-delà) où tout un chacun est sur un pied d’égalité ? Idem lorsqu’un président affirme péremptoire, en oubliant la civilisation égyptienne, en oubliant la maîtrise des métaux, en oubliant même l’esclavage, que “l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire” (Nicolas Sarkozy – discours de Dakar – août 2007) ?
Dans le dilemme : le temps béni des colonies versus l’enrichissement commun dans une Europe unie, la droite la plus bête du monde a choisi : la nostalgie !
Et donc…
Lors des législatives des 30 juin et 7 juillet, les citoyens de l’Hexagone choisiront non seulement une majorité et un gouvernement, mais ils se prononceront aussi, sans forcément en avoir conscience, sur l’appartenance de la France à l’Union européenne. En effet, même si Marine Le Pen et Jordan Bardella ne prônent plus la sortie de l’Union et le retour au franc, la mise en œuvre de leur programme aboutira inéluctablement à un Frexit de facto.
Programme économique, tout d’abord (mais l’appliqueront-ils ?) qui ne peut que creuser le déficit public. Puisqu’aucune recette nouvelle ne compensera les dépenses et qu’ils ne veulent pas réformer l’impôt, ou seulement restaurer celui sur la fortune. Ce qui provoquera rappel à l’ordre sur rappel à l’ordre de la part de Bruxelles. Jusqu’à un clash final.
Programme en matière de norme constitutionnelle et de respect des traités, ensuite : comment mettre en oeuvre la honteuse “préférence nationale”, sans abandonner toute référence à l’article un de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen : “Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits” ? Car les traités européens et la Constitution française sont aujourd’hui trop imbriqués juridiquement par de constantes jurisprudences et actions communes, pour que l’on puisse voter une loi discriminatoire sans rompre l’engagement européen.
Et revenir à l’Ancien Régime ? Pourquoi pas, après tout. Car il bien connu, depuis Alphonse Allais, que passées les bornes, il n’y a plus de limites. A la connerie…